L’histoire de l’hygiène corporelle est très liée à celle de l’hygiène publique .La création d’un service de distribution d’eau dans une ville ou un village améliorent les conditions de l’hygiène« privée » mais les traditions concernant la propreté et les soins du corps évoluent de façon fort lente et de façon indépendante du progrès technique.(Au ministère de la santé publique on ne trouve aujourd’hui qu’un service d’éducation sanitaire qui soit chargé de ces problèmes d’hygiène privée, la sous- direction de la protection de l’enfance).

Les limites de l’histoire de l’hygiène corporelle sont très floues car elle touche à la fois au corps, à la santé, à l’hygiène des collectivités, à l’hygiène du milieu du travail et à celle de l’habitat.

Le professeur COURMONT (1914) insiste longuement sur le lavage des mains « avoir les mains propres, ne se mettre à table qu’avec les mains propres. Combien de maladies sont des maladies de mains sales. N’apprendrait-on que cela à l’école, on rendrait un immense service »

Au début du siècle la propreté était un mot magique ,la base de toute prophylaxie, avec la propreté on détruit la graine(microbes, champignons, insectes) des maladies et on fortifie le terrain. Les liens avec la morbidité étaient à cette époque très étroits)(cf. Pr J.Courmont).Il faudrait enseigner la propreté à l’école, au régiment ,dans les consultations de nourrissons ,à l’hôpital, sans parler des campagnes. La propreté est un bloc : propreté du corps, du linge, des vêtements, du logis, des aliments.

L’histoire de l’hygiène corporelle est interdisciplinaire ,elle est liée à l’histoire des techniques : apparition des baignoires, tubs, chauffe- eau, du savon ,des produits d’hygiène. A l’histoire des équipement collectifs : service de distribution d’eau, création des bains douches municipaux, à l’histoire du logement et de son confort : distribution de l’eau dans les logements, apparition des salles de bains, des salles d ‘eau. Elle est reliée également à l’histoire des travaux ménagers et notamment à la lessive (propreté du linge, et les changements fréquents du linge sont des concepts récents),à l’histoire du travail (la toilette après le travail, l’apparition des douches et lavabos dans les usines) .L’inspection du travail s’est intéressée très tôt à ce problème, peu d’industries ,même les plus salissantes et les plus malsaines sont dotées de lavabos propres et pratiques. Les ouvriers n’ont presque jamais à leur disposition savon ou serviettes

 « Mon onc d’Avesnes de Solange Meresse Notebaert » : l’hiver fut rigoureux et précoce, grand père qui regardait à la dépense dut se résigner à le laisser marcher tard dans la nuit le petit poêle qui chauffait la maison, grand-mère avait pourtant calfeutré portes et fenêtres de boudins de tissu mais cela ne suffisait pas à empêcher le vent du nord qui soufflait en rafales et le froid d’entrer. »

« L’été ce grenier mal aéré était une véritable fournaise et l’hiver ses occupants y gelaient, se réveillaient blanc de neige . »

« Elle est reliée à l’histoire des travaux ménagers et de la lessive. Dans la pièce principale il y avait un grand fourneau ,grand-mère y faisait chauffer l’eau des lessives et des grandes toilettes.

 

Pour cela il fallait tirer l’eau du puits commun fermé à clé , chacun ayant sa clé, et ensuite l’amener à la maison seau après seau. La famille ne profitait dé l’cuvialle (cuveau de bois qui ne servait de baignoire que le dimanche matin les autres jours chacun se contentaient d’une toilette hâtive. »

  • La propreté était enseignée au même titre que la morale, au nom du respect de soi mais souvent de façon sommaire : chaque matin il faut laver son visage et ses mains, brosser ses dents, peigner ses cheveux et une fois par semaine au moins se laver le corps en entier et sa chevelure.

« Au collège il n’y avait de robinet nulle part car il n’y avait pas encore d’adduction d’eau potable, cela expliquant la présence du cabanon en planches juste au milieu de la cour abritant la pompe aspirante et foulante mue par un moteur au gaz d’éclairage. Plusieurs fois par semaine on mettait en route sa mécanique, elle alimentait une grande cuve perchée au sommet d’une maçonnerie, c’était le château d’eau en ce temps-là. Le matin on ouvrait une vanne et le lavabo débitait son eau en quarante petits jets. En hiver lorsque la canalisation gelait on remplissait le bac du lavabo avec des seaux d’eau de pluie qu’on allait chercher dans une citerne. Les pensionnaires se lavaient tous dans le même baquet , c’est-à-dire qu’ils se mouillaient simplement le bout du nez. Il arriva souvent que l’eau mise la veille était gelée dans le bac, nous arrivions devant le lavabo avec un gant de toilette raide gelé lui aussi…Alors un coup de peigne et la toilette était finie. » (en ce temps-là de Auguste HANON)

En 1923, seulement 23% des communes disposent d’un réseau de distribution, les habitants ne disposant pas de l’eau courante devaient se rendre aux points d’eau tels que des fontaines pour faire des réserves, les plus riches d’entre eux engageaient des « porteurs d’eau »

C’est également en octobre 1923 qu’eu lieu le premier salon des arts ménagers et que des magazines comme « le petit écho de la mode » contribuait à faire connaitre de nouvelles habitudes domestiques. Tout évoluait : les meubles, avec moins de tables de toilettes mais des lavabos à leur place, aussi les matériaux avec les matières synthétiques qui font leur apparition dans le textile.

L’arrivée de l’eau courante dans la quasi-totalité des maisons date de la fin des années 1980. Dans les villages l’eau courante n’existait pas et dans les bourgs elle ne le fut qu’après 1940, beaucoup de gens continuaient à utiliser de leur citerne ou de leur puits. On économisait pour tout : pour la vaisselle et pour le lavage du linge .

Les fromages de chèvres sur une feuille de châtaignier séchaient sur une planche au courant d’air sans être couverts d’un linge, à la grande joie des mouches qui venaient y pondre, et que dire des poules qui entraient dans la salle et qu’on chassait parfois ou dont on hébergeait la couvée sous l’édredon

Quant aux cabinets d’aisance : deux planches au-dessus d’un trou. L’après- guerre conduit toujours à dresser un bilan économique et social pour mieux cerner les besoins à satisfaire, il s’avère que la santé publique et notamment celle des enfants reste préoccupante surtout dans le nord. La tuberculose constitue un des quatre fléau sociaux à combattre. Face à ce constat Jeanne ROUSSELLE et un groupe d’humanistes, la plupart des industriels de la Sambre-Avesnois ont eu un coup de cœur d’où l’idée de créer une association dénommée « Œuvre du Préventorium de l’Arrondissement d’Avesnes » soutenue favorablement par le Sous–Préfet Fernand Leroy, elle est déclarée au Journal Officiel le 23 août 1922. Son but est d’améliorer la santé publique et en particulier celle des enfants.

La  » peste blanche « 

La tuberculose touche principalement la classe ouvrière, la moins bien nourrie et logée, les conditions de logements et le surpeuplement des lieux de travail étant en terme de promiscuité des éléments déterminants de la propagation de la maladie . La prévention de la tuberculose repose sur l’amélioration des conditions de vie : lutte contre la pauvreté, l’habitat malsain et la malnutrition d’où les politiques engagées dans le mouvement hygiéniste et la construction de sanatorium qui devient l’un des investissements publics programmés pour lutter contre la tuberculose.

Rien qu’en France ce sont 250 sanatoriums qui ont été construits de 1900 à 1950 ,période à partir de laquelle les antibiotiques ont permis de lutter contre ce fléau. Ils sont souvent associés à une végétation de pins et ou de sapins dont les essences étaient réputées favoriser la guérison des maladies pulmonaires et respiratoires

En France en 1919, la loi HONNORAT, faisant suite à la loi LEON BOURGEOIS su 15 avril 1916 qui instituait des dispensaires d’hygiène sociale, impose le création d’un sanatorium par département.

La découverte de la pénicilline en 1928, puis la mise au point à la fin des années 1930 des premiers sulfamides ont ouvert un champ immense à la thérapeutique.

En 1943, ALBERT SCHATZ isole la streptomycine qui devient le médicament contre cette maladie. Dès lors le traitement de la maladie par cet antibiotique ou d’autres médicaments antituberculeux entraîne la fermeture des sanatoriums les uns après les autres, les bâtiments étant parfois reconvertis en logements, écoles ou autres institutions .

Nadine Lenoble

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